L’économie ne sera pas virtuelle
Le dernier billet d’ecosphere met le doigt sur la bulle 2.0 : les survivants de la nouvelle économie n’ont pas tiré de la déroute de leurs anciens confrères les même leçons que les banques, et dans le contexte des absorptions déjà évoquées là valorisent leurs proies à des tarifs faramineux.
Ainsi Yahoo! a-t-il valorisé Facebook, site de social networking centré sur les universités US et qui a rejeté l’offre, à 1 milliard de dollars. Il faut savoir que le résultat net attendu par Facebook en 2006 est de 9 millions de dollars. Comment arrive-t-on à valoriser une entreprise plus de 100 fois ses bénéfices alors qu’à titre de comparaison le ratio est de 20 pour Microsoft, 40 pour Yahoo!, ou 10 pour Total qui est la plus grosse capitalisation française ?
C’est simple : on se projette en 2015 (qui sait ce qui se passera d’ici là ?) et on imagine qu’à cet horizon le nombre d’utilisateurs actifs chez les étudiants américains passera de 17% à 55% : 273 milliards de pages vues par an. On imagine aussi que les annonceurs seront prêts à payer 15 fois plus qu’aujourd’hui pour montrer leur publicité à 1000 visiteurs. Comme en plus il y aura plus de 10% d’étudiants supplémentaires d’ici là, c’est le jackpot.
Le principal problème, ce n’est pas que des concurrents plus séduisants vont sans doute apparaître, annihilant le business de ce site en particulier, mais bien que globalement la publicité seule ne pourra pas financer de tels mastodontes : si ces sites continuent à être financés exclusivement par la publicité, et que les investisseurs parient sur une croissance des revenus supérieure à la croissance des budgets publicitaires, ils vont dans le mur. Et avec eux toute l’économie qui dépend d’eux.
Pour que les stars d’aujourd’hui gagnent demain 50 fois plus qu’aujourd’hui alors qu’elles sont déjà leaders de leur marché, il faudra que ce marché attire 50 fois plus d’argent. Or Internet attirait déjà fin 2005 23% des budgets publicitaires…
Les sites condamnés à la rentabilité par leur valorisation d’aujourd’hui devront donc s’écarter du tout gratuit sachant qu’il y aura toujours des communautés plus ou moins désintéressées prêtes à proposer un service gratuit. Il faudra donc que ces sites trouvent quelque chose à vendre : l’économie de demain ne sera pas virtuelle.