Microsoft 1.0
2007. Le desktop est depuis longtemps devenu une commodity. Google mène la danse pour développer des applications en ligne s’exécutant dans le navigateur indépendamment de l’OS. Dans un monde où le « Software As A Service » n’est plus seulement un buzzword, où les entreprises proposent à leurs clients non plus des produits à faire fonctionner au prix fort, mais des services hébergés exposés sur des API ouvertes, Steve Ballmer, CEO de Microsoft, ex-maître du monde, se résigne : « There is a big disruption going on in our business. And some investors will say it’s scary, it’s this, it’s that, are you going to embrace it? We have no choice. »
C’était jeudi dernier face aux analystes financiers. Le verbatim et le powerpoint ne sont plus en ligne.
La lecture de cette intervention est troublante : plus de trois ans après l’article Open source paradigm shift de Tim O’Reilly qui posait les bases du « software as a service », modèle qui s’impose aujourd’hui de plus en plus largement sur le web et dans les entreprises, Steve Ballmer répond avec le « software plus services ». Cette façon de s’agripper aux vieux paradigmes a quelque chose d’anachronique, d’irréel. Comme un pilote d’avion qui verrait décoller une fusée vers Jupiter et s’exclamerait : « Super, en volant un peu plus haut sur Paris-Strasbourg on pourra éviter les cigognes ! »
Face à une telle myopie, la volonté annoncée de devenir un leader de l’électronique grand public, six ans après le lancement de l’Ipod par Apple, paraît insignifiante. Ce n’est pas en traînant des pieds que Microsoft rattrapera la fuite en avant des rois du service en ligne, Google et Yahoo! en tête. Et les dépenses faramineuses en R&D (30 milliards de dollars depuis 5 ans) laissent une vertigineuse impression de vide : le plus beau des tunneliers ne creusera jamais jusqu’aux étoiles.
Alors oui, il y a peut-être aujourd’hui plus de PC sous Windows que de voitures dans le monde, mais le vent tourne et Steve Ballmer a l’air d’un empereur déchu qui contemple en rêvant son empire alors qu’une armée enfonce les portes du palais. Et qui espère qu’il va se réveiller :
« Could I get the first slide, please. It’s not working. The first slide please. »