Le progrès carbure à l’abondance

Chris Anderson est l’inventeur en 2004 du concept de la Long tail. Il est aussi l’éditeur du magazine Wired. Dans une allocution donnée à la conférence Nokia World le 5 décembre dernier, Chris nous fait réfléchir sur l’impact de l’abondance dans le progrès technologique : lors de l’introduction du nucléaire domestique dans les années 50, certains ont affirmé que ce progrès rendrait l’électricité gratuite, car infiniment disponible. On sait aujourd’hui que c’est faux, mais que se passerait-il si c’était vrai : à quoi ressemblerait le monde si l’électricité était réellement gratuite, si on disposait ainsi d’une source d’énergie infinie ?

Au-delà de cette expérience de pensée, les interfaces graphiques sont apparues lorsque les ingénieurs, tirant parti de la Loi de Moore, ont accepté de gaspiller des transistors, des cycles CPU, de faire comme s’ils étaient gratuits. Et cette évolution a permis à des non-ingénieurs d’accéder à l’informatique, et d’ouvrir de nouvelles perspectives.

Aujourd’hui le coût du stockage diminue de façon exponentielle : $10/To en 2010. Et alors que de nombreuses entreprises continuent de limiter la taille des boîtes mails internes à quelques centaines de Mo, Yahoo! qui a compris la tendance propose depuis mai 2007 une capacité de stockage infinie pour son webmail !

Enfin avec l’abondance de la bande passante, la distribution devient gratuite ce qui facilite l’expérimentation et permet à des contenus ou des services d’apparaître. L’Internet devient un magasin avec des étagères de capacité infinie où n’importe qui peut venir placer ses produits. Ce qui permet à des microacteurs d’adresser les besoins des minorités (la Long tail).

En définitive, quand une ressource devient presque gratuite, faites comme si elle était complètement gratuite, et vendez autre chose ! Et pour tout ce qui touche à la technologie, le coût des ressources finit forcément par tendre vers zéro…

Et même, avec d’autres motivations que l’argent, comme la réputation, la reconnaissance, des gens écrivent des articles, ou du code, gratuitement.

D’où l’émergence de nouveaux business models :

Et pour les opérateurs télécoms, un dilemme : si la nécessité de leur transformation en opérateurs de services est aujourd’hui évidente, peuvent-il réellement compter sur leur maîtrise du réseau pour proposer à l’utilisateur un meilleur service et obtenir un avantage face à des acteurs comme Google ? Ou bien la commoditisation des tuyaux ne conduit-elle de toute façon pas à une égalité avec les pure players du contenu ?

Je pense que la maîtrise du réseau donne simplement un temps d’avance : cela peut fournir aux telcos un avantage, à condition qu’ils soient très réactifs pour proposer des services innovants, et tirent parti de leurs ressources avant qu’elles ne deviennent gratuites.


En lire plus sur : telcos , web 2.0